[Tribune de Géraldine Poivert, Présidente et co-fondatrice The (RE)SET Company]
Projet de loi Climat et Résilience,
de la raison d’être à la raison d’agir : devançons l’appel !
Au printemps 2020, le législateur, dans son ambitieuse « loi Pacte », a modifié l’article 1835 du Code Civil et, ce faisant, proposé aux entreprises de redéfinir leur « raison d’être ».
L’ambition, noble et fondamentale, était de consacrer la notion d’intérêt social et de renforcer la prise en compte des enjeux sociaux et environnementaux dans la gestion de leur activité. Avec une idée clé : être compétitif. Et s’occuper également de prospérité sociétale. Le pas est pris au moins dans la loi. Les assemblées générales examinent de plus en plus ces résolutions, les référentiels et certifications voient le jour.
POUR AUTANT, UN AN PLUS TARD, NOUS ATTENDONS TOUJOURS LA REVOLUTION COPERNICIENNE ESPEREE, LE BIG BANG D’ACTIONS.
Ce faisant, le risque existe que cette « raison d’être », faute de matérialité, se transforme en « catalyseur de déception », pour reprendre les expressions de Bernard Sananès (Président d’Elabe) dans sa « tribune » au journal Les Echos du 8 octobre 2019. En d’autres termes, pour paraphraser Paul Valéry, la « raison d’être » appliquée aux entreprises pourrait bien, si l’on n’y prend garde, « chanter plus qu’elle ne parle » et « demander plus qu’elle ne répond ».
Des précédents existent. Depuis près de 20 ans, les entreprises cotées en bourse ont ainsi l’obligation de publier chaque année un rapport dit RSE (responsabilité sociale de l’entreprise), cette obligation ayant été étendue à toutes les entreprises de plus de 500 salariés ainsi qu’aux collectivités locales de plus de 50 000 habitants.
Ces obligations, dont on comprend bien l’intention éminemment louable, ont développé de nouveaux business, notamment celui de rédacteur de rapport RSE, de notations toutes plus complexes les unes que les autres.
Un exercice de style parfois de haute voltige, relevant souvent plus du dire que du plan d’actions.
Mais l’inaction est périlleuse. Car les citoyens, mieux formés et informés, sensibilisés chaque jour aux questions de transition écologique, ne sont plus dupes.
Et leur confiance très relative vis-à-vis du monde de l’entreprise se révèle à chaque enquête. Pendant la discussion de la loi Pacte, environ un français sur dix seulement affirmait avoir « entendu parler » de la nouvelle injonction de « raison d’être » des entreprises et « y croire ». Pas sûr que les chiffres soient différents aujourd’hui.
Les moyens existent, pour les entreprises, de convaincre les citoyens-consommateurs.
Ils doivent être guidés par un principe simple : LA RAISON D’ETRE, C’EST BIEN, MAIS LA RAISON D’AGIR, C’EST MIEUX, C’EST CONCRET, C’EST UTILE.
Il faut donc ajouter à la raison d’être, la raison d’agir. Et il ne s’agit pas de remplacer un slogan par un autre, IL FAUT LE FAIRE ! WALK YOUR TALK COMME DISENT LES ANGLAIS.
Lorsqu’elles y sont fortement contraintes, les entreprises trouvent les moyens de s’adapter à des contextes nouveaux. La pandémie en a offert de multiples exemples. L’explosion du travail à distance en est un : ce que l’on croyait impossible, ou ne devant que très lentement progresser, s’est avéré faisable, sans préjudice excessif. Des méthodes de travail ont été remodelées, inventées, des process novateurs imaginés.
Faisant preuve de « raison d’être et d’agir » les acteurs de la cosmétique et du textile ont su, en quelques mois, remplir des flacons de gel hydroalcoolique en lieu et place de parfum, et tisser des masques dans leurs usines de confection.
Les entreprises savent donc s’adapter. Il leur faut lever les yeux du guidon, considérer les moyen et long terme, pour se convaincre que leur intérêt est non seulement d’être mais aussi d’agir.
Et découvrir des gisements fertiles de profits directs, sociétaux et environnementaux. Car les deux vont de PAIR.
Plutôt que d’attendre les coups de bâton et les interdictions écologiques, le monde de l’entreprise gagnerait à anticiper. Il y gagnerait en reconnaissance des citoyens-consommateurs, mais aussi en compétitivité, en agilité, en business.
On peine aujourd’hui à trouver un secteur qui se serait auto-réglementé, qui n’aurait pas attendu le joug de la loi, voire le verdict de la justice.
Pourtant, la raison d’être ne doit être considérée que comme la première pierre de l’édifice, le camp de base d’un Everest ayant pour nom « action », plutôt que réaction.
Le projet de loi Climat et Résilience, attendu comme le messie juridique de l’écologie, puis critiqué et même moqué avant même son adoption, ne doit pas nous faire oublier que l’entreprise est l’acteur principal de la transition.
Il ne tient qu’à elle d’agir. (RE)SET est là pour l’y aider.
Alors faisons de ce débat législatif une raison d’agir et non une joute de faux débats sur le report des calendriers.
« Car il n’y a que deux conduites dans la vie : on la rêve ou on l’accomplit », René Char grand poète et résistant.